Le frisson du départ !

Chaque jour, vous facturez, encaissez et devez faire face à des charges professionnelles et dépenses personnelles. Si vous ne disposez pas d'outils adaptés, vous allez vite vous retrouver dans le brouillard. Imaginezvous en train de piloter sans aucune visibilité et sans instruments. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle vos collègues expérimentés, eux-mêmes souvent "démunis", vous ont mis en garde : « Attention ! Ne confonds pas recettes et bénéfice ; ne dépense pas trop ; pense à la fin d'année, aux régularisations sociales futures... ». De quoi vous donner le frisson. Bien sûr, votre comptable vous dira où vous en êtes en fin d'année lors de votre déclaration 2035, mais ce sera dans plus de douze mois ! Alors comment faire pour savoir où vous en êtes ? Comment percevoir les dérapages et réajuster avant qu'il ne soit trop tard ?

Piloter aux instruments

Un tableau de bord de gestion est un ensemble d'indicateurs permettant de suivre l'évolution des résultats, les écarts par rapport à des valeurs de référence. La première année, n'ayant aucune antériorité, ce sont les chiffres du prévisionnel qui serviront de référence. La seconde année, la comparaison sera faite en mois glissants avec les données des douze derniers mois. Quatre types d'indicateurs sont à surveiller :

• ceux financiers ;
• ceux d'activité (chiffre d'affaires/CA) ;
• ceux de rentabilité ;
• ceux spécifiques à l'entrepreneur (sa situation financière vis-à-vis de l'entreprise).

Un entrepreneur avisé exploite les instruments qui lui permettent de prendre les bonnes décisions, au bon moment, sans attendre la fin de l'exercice comptable. Voici nos conseils pour bien s'y prendre.

1.Mes finances

Votre compte en banque est l'indicateur ultime de la qualité de votre gestion. Le découvert en banque est souvent les prémices de difficultés ; s'il continue à se creuser, on connaît la suite... Hier vous perceviez un salaire ; il vous était facile d'interpréter la signification du niveau de votre solde bancaire : votre compte est à découvert = danger, votre train de vie n'est pas compatible avec votre salaire ! Pour votre entreprise, il ne faut pas attendre le découvert pour s'alarmer mais le surveiller régulièrement.

Exemple : en fin de mois, vous disposez de 18000 € en banque. Si votre CA est de 9000 €/ mois, vous avez une avance de trésorerie deux mois devant vous. Votre tableau de bord pourra être illustré par un compteur dont l'aiguille montre +2 mois de CA d'avance bien rassurant.

Attention, c'est votre première année : vous payez des charges sociales forfaitaires largement inférieures à ce qui vous sera réclamé par la suite. Il faut que le solde de votre compte bancaire augmente à bonne cadence pour faire face à cette dépense future. La bonne solution consiste à payer vos charges et impôts réels dans l'année ellemême, calculés sur la base de votre bénéfice estimé lors d'un audit d'optimisation.

2.Mes produits

Le CA est l'indicateur qui permet d'apprécier la satisfaction de vos patients. C'est aussi un indicateur qui anticipe le "salaire" du professionnel et la possibilité de payer ses frais. Il est souvent représenté par un graphique, pas si simple à interpréter.

Exemple : dans votre prévisionnel, vous aviez prévu un CA de 110000 € sur une année. Après neuf mois vous avez réalisé 73000 € de CA. Comment savoir si vous êtes en avance ou en retard sur votre plan de route ? Un indicateur doit attirer votre attention sur l'avance ou le retard. Ici, après calcul l'indicateur évalue le retard à 9 500 € soit plus d'un mois de CA. Difficile à rattraper ! Ici votre indicateur pourra être représenté par un compteur dont l'aiguille sera dans le rouge et indiquera : -1 mois de CA en retard.

Alerté, vous allez procéder à d'autres analyses fines. Certains logiciels, comme Vite Ma Compta, vous proposent des outils mathématiques. Il vous sera ainsi possible de lisser les irrégularités pour percevoir la tendance. En la prolongeant, il est possible d'anticiper "ce qui se passerait si" cette évolution se poursuivait et de prendre des mesures nécessaires :

• en cas de diminution : travailler plus, réduire les dépenses et vos prélèvements ;
• en cas d'augmentation : lever le pied, recruter, collaborer, s'associer, vendre...

Surveillez le point mort ou "seuil de rentabilité". Il s'agit du chiffre d'affaires minimum qu'il faut réaliser pour payer les divers frais et couvrir les prélèvements personnels de l'exploitant (ses "salaires" voir § 4) ;

• en deçà : vos recettes ne couvrent pas vos charges, votre activité n'est pas viable sur le long terme sans adaptation ;
• au-delà : félicitations ! Vous générez un revenu qui dépasse vos coûts. Travailler davantage dans ce cas ne sert pas seulement à "gagner plus" pour consommer. Cela vous offre la possibilité d'épargner et d'investir.

3. Mes résultats

Le résultat est un indicateur en soi. Il montre l'équilibre entre les produits et les charges. Il se calcule de la manière suivante :"produits - charges = résultat", lequel doit être positif. Dans une entreprise individuelle, le résultat est le "salaire" du dirigeant. C'est sur ce dernier qu'il va payer ses investissements et rembourser l'emprunt. L'importance du résultat est essentielle pour l'entreprise (solidité, développement ...) comme pour l'entrepreneur lui-même.

Exemple : la variation entre le bénéfice des 12 derniers mois (48 000 €) et celui des 12 mois précédents (39 000 €) est de 9000 €. Sachant que le CA de référence est de 9000 €/mois, l'indicateur sera dans le vert et indiquera + 1 mois de CA.

4. Mes prélèvements personnels

Votre rémunération dépend du résultat mais celui-ci ne sera connu que quinze mois après le début d'un exercice. En attendant, il est essentiel de se fixer une avance mensuelle suffisante pour couvrir vos besoins personnels et en même temps compatible avec le budget de votre entreprise. L'idéal : mettre en place un virement automatique entre vos comptes pro et perso, comme si vous étiez salarié. Au moment du bilan le bénéfice sera alors supérieur aux douze avances faites : résultat annuel - acomptes = solde du compte 108000.

Exemple : bénéfice annuel de 48 000 € - douze prélèvements de 2 500 € = 30000 €.
Vous avez constitué une "cagnotte" de 18 000 €. Vous disposez ainsi d'une réserve équivalente à deux mois de CA. L'aiguille de l'indicateur est dans le vert et indique un bonus égal à 2 mois de CA.

Ce montant correspond à la part du résultat acquis non encore prélevée. Vous pourrez vous verser alors un bonus ou, au contraire, vous constituer une "cagnotte". De quoi envisager un investissement sans déséquilibrer votre trésorerie.

Le plafond de verre

On l'oublie parfois, mais votre métier repose avant tout sur une relation de confiance avec vos patients. Ils vous choisissent, vous apprécient, vous recommandent. Cette reconnaissance humaine a un impact direct aussi sur votre réussite économique : plus votre patientèle grandit, plus votre activité se développe, et plus vos revenus augmentent. Mais cette croissance atteint tôt ou tard une limite naturelle : votre temps.

Oser franchir le cap

C'est à cet instant que l'entrepreneur libéral doit se réinventer et faire des choix stratégiques : recruter un remplaçant ou un collaborateur, s'associer avec d'autres professionnels, créer une structure collective (maison de santé, regroupement), vendre une partie de sa patientèle pour se dégager du temps...

Anticiper, choisir, piloter

Loin d'être un simple soignant, vous devez aussi piloter votre entreprise : anticiper, vous adapter, choisir ! Grâce à un tableau de bord clair, mis à jour en permanence, automatiquement sans effort de votre part, vous pourrez agir avec ambition et lucidité. Vous transformerez votre activité parfois subie en un projet passionnant et maîtrisé.

Loin d'être un simple soignant, vous devez aussi piloter votre entreprise : anticiper, vous adapter, choisir !

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