Pour gérer la pénurie, l'État pourrait de
manière autoritaire contingenter une offre
rationnée. Il se propose, au contraire, d'inciter les professionnels libéraux à se regrouper
volontairement pour organiser eux-mêmes,
au niveau d'un territoire, une offre de soins
en constituant une association loi 1901
capable d'assurer cette mission de service
public : la CPTS.
La FNI s'est beaucoup investie dans ce projet, engagée dans d'âpres négociations avec
l'esprit de responsabilité qu'on lui connaît,
ce qui a débouché sur une solution de
compromis.
Les CPTS (associations interprofessionnelles de santé libéraux) signent avec leurs agence régionale de santé (ARS) et caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) un contrat d'une durée de cinq ans par lequel « ils s'accordent sur un certain nombre de missions prioritaires dont il apparaît que le déploiement sur l'ensemble du territoire d'intervention a vocation à favoriser l'accès aux soins, la fluidité des parcours des patients, la qualité et l'efficience des prises en charge, l'amélioration des conditions d'exercice des professionnels de santé ». En contrepartie, les CPTS reçoivent des financements substantiels
Les recettes (financement d'État)
L'Accord conventionnel interprofessionnel
(ACI) pour les CPTS prévoit deux volets de
financement selon la taille de la structure :
l'un pour le fonctionnement, l'autre pour
la mise en oeuvre de chacune des missions.
Il existe des financements complémentaires
(voir tableau ci-dessous).
Les dépenses
Exemple des principales dépenses
d'une CPTS totalisant un financement de
170000 € :
Montant de l'aide annuelle pour le déploiement des CPTS | ||||
---|---|---|---|---|
Moins de 40 000 habitants | Entre 40 000 et 80 000 habitants | Entre 80 000 et 175 000 habitants | Plus de 175 000 habitants | |
Financement annuel total possible | 287 500 € | 382 500 € | 487 500 € | 580 000 € |
Montant de l'aide annuelle pour le déploiement des CPTS | ||||
Financement structure (mission socle) | 90000 € | |||
Accès aux soins (mission socle) | 155000 € | |||
Coordination/parcours (mission socle) | 100000 € | |||
Prévention (mission socle) | 40000 € | |||
Crise sanitaire grave (mission socle) | 125000 € | |||
Qualité et pertinence (mission optionnelle) | 40000 € | |||
Accompagnement des professionnels de santé(mission optionnelle) | 30000 € | |||
Total | 580000 € |
Les financements sont proportionnels au bassin de population couvert par la CPTS.
Source : https://www.ameli.fr/medecin/actualites/communautes-professionnelles-territoriales-de-sante-decryptage-de-l-accord-signe-et-des-2-avenants'
Certains financements sont dédiés à des postes budgétaires précis et ne peuvent être affectés à d'autres missions. D'une année à l'autre, lorsqu'il reste un reliquat, il sera utilisé pour la même mission. Un suivi extra-comptable ou par comptabilité analytique sera effectué pour respecter le contrat signé et les préconisations de l'Autorité des normes comptables (règlement n°2018-06 du 5/12/18).
Contrairement au principe des fonds dédiés, certains financements de la CPTS sont moins contraints car celle-ci peut définir librement son budget de dépenses au regard de l'organisation et des actions qu'elle met en oeuvre, sans être contrainte par le montant des fonds reçus mission par mission. C'est ce que l'on nomme le "principe de fongibilité". Il n'est en revanche pas possible d'utiliser des fonds de l'ACI en compensation de ceux prévus pour d'autres projets hors ACI.
Pour rappel, la plupart des CPTS sont des associations à but non lucratif loi 1901 et, à ce titre, ne sont pas assujetties aux impôts commerciaux (impôts sur les sociétés-IS, TVA et cotisation foncière des entreprises-CFE). En revanche, les CPTS percevant des fonds publics supérieurs à 153000 € par an ont l'obligation de nommer un commissaire aux comptes pour certifier leurs comptes annuels. Dans tous les cas, il est recommandé de mettre en place une comptabilité analytique afin de suivre les dépenses en fonction du contrat signé avec l'ARS et la Cpam.
Très engagé dans son territoire et très actif sur le plan syndical (président FNI de la
Somme), Franck Perez a rejoint la CPTS du Grand Amiens dont il
est devenu le trésorier. Les premières actions et réunions pour
améliorer l'offre de soins dans le Grand Amiens ne se font
pas attendre. Heureusement, grâce à l'accord signé avec
l'ARS, ce temps mobilisé fait l'objet de compensations sous
forme d'ICPA.
Lorsqu'en 2020 survient la pandémie, la CPTS est mobilisée
sur tous les fronts pour organiser la vaccination en masse
dans le cadre d'un contrat pluriannuel d'objectifs et de
moyens (CPOM) signé avec l'ARS. Un bel exemple de mission
de service public effectuée par les professionnels de santé libéraux
du territoire.
Parmi les projets de la CPTS du Penthièvre (22), le "Plan été" tient particulièrement au coeur de son président, Fabien Soreau, également président de la FNI des Côtes-d'Armor. La saison estivale connaît en effet un afflux de visiteurs alors même que de nombreux professionnels de santé du territoire sont eux-mêmes en congés. Face à cette situation, ces derniers, dans le cadre de la CPTS, se sont réunis pour coordonner l'offre de soins de ville avec l'hôpital. Lorsqu'un patient appellera le 15, il sera ainsi orienté, selon sa pathologie, tantôt vers l'hôpital, tantôt vers un cabinet infirmier de garde, qui lui-même aura la possibilité de recourir à une téléconsultation avec un médecin grâce à la plateforme Inzee.care. « Une coopération conviviale fondée sur des échanges bienveillants produit une intelligence collective bénéfique aux patients comme à la communauté soignante » constate ainsi M. Soreau.
Les ICPA viennent compenser les honoraires non perçus par un professionnel
libéral pour le temps passé à la gestion de
la CPTS. Ils font l'objet de forfaits définis
par le règlement intérieur selon les missions
(par exemple 200 € pour une réunion en
présentiel de plus d'une heure ; 100 € pour
une visioconférence).
S'agissant de fonds conventionnels, les professionnels les déclarent dans les mêmes
conditions que les honoraires conventionnés et bénéficient donc de cotisations
maladie allégées.
La réussite de ce projet de coordination
des professionnels de santé nécessitait
une solution suffisamment incitative pour
engager ces derniers à accomplir sans perte
de rémunération des missions de service
public. C'est la raison pour laquelle vous
allez bénéficier d'ICPA qui se doivent d'être
à la hauteur du service rendu.
Les deux témoignages ci-dessus illustrent
bien l'utilité des CPTS et l'enthousiasme
qu'elles génèrent. Les projets sont portés par la force du collectif à l'échelle du
territoire.
En participant à une CPTS, comme le préconise la FNI, vous n'allez pas laisser aux
autres le soin de décider à votre place.
Attention toutefois, si l'aventure vous tente,
à conserver tout de même un bon équilibre
entre votre implication dans la CPTS et votre
activité professionnelle.